Nous fêtons en 2024 le centenaire de Gust Graas avec un bilan de deux carrières à succès: le jour à RTL, pépinière de radios et télévisions, et la nuit dans son atelier, où il recrée un monde d’harmonie et de beauté.
Gust Graas est né le 19 décembre 1924 à Esch-sur-Alzette. Dès son jeune âge, Gust excelle en dessin et en peinture. Il reste un grand dessin du château de Clervaux et un autoportrait dans l‘uniforme kaki de l‘armée nazie, dans laquelle il a été enrôlé de force en 1942.
Après cet épisode sombre, Gust reprend ses activités artistiques quotidiennes, en parallèle à sa vie bien remplie d‘étudiant, de jeune avocat indépendant, de militant politique, puis de chef du personnel et de juriste à Radio Luxembourg en 1952. Il immortalise sa famille et ses paysages dans de petites peintures à l‘huile.
En 1963, le CAL (Cercle Artistique de Luxembourg) lance un appel à tous les peintres luxembourgeois pour proposer un tableau sur le Luxembourg millénaire. Pour la première fois, Gust montre une œuvre en public. Deux années plus tard, en 1965, Gust surprend avec sa première exposition individuelle, répétée ensuite régulièrement dans différentes galeries luxembourgeoises.
L‘obtention du Prix Grand-Duc Adolphe en 1970 et des expositions prestigieuses au Musée National d‘Histoire et d‘Art et à la Villa Vauban confirment son succès.
En 1973, la carrière internationale de Gust Graas décolle à la Galerie Angle Aigu, Bruxelles, avec «Abstraction poétique». Suivent Vienne, l‘Allemagne, la France, l‘Italie, la Grande-Bretagne, Hongkong…
En 1988, Gust quitte RTL et va vivre définitivement à Majorque, où il poursuit sa carrière artistique. Il décède le 19 février 2020 à l’âge de 95 ans au Senningerberg.
Gust Graas reste l’un des grands artistes luxembourgeois. Il a exploré le cheminement de l’art du figuratif à l’abstraction lyrique. Ses œuvres abondantes en peinture, dessin, sculpture et écrit témoignent tous de sa recherche du plus profond de lui-même.
« Quand on plonge dans l’œuvre du peintre et sculpteur Gust Graas, les femmes émergent continuellement.
Ce sont d’abord les femmes de son entourage direct. Sa femme Lydia, sa sœur Monique, ses deux filles Kit et Jeanne. Ces personnages féminins sont peints plus conventionnellement. Presque toutes les femmes sont en position d’attente, en train de tricoter ou regarder Papi en face.
Plus tard, Gust Graas peint des femmes idéales nées dans son imagination : des portraits de femmes, – comme la femme aux limons et la femme aux mangues, – et des nues.
Ce sont surtout les nues avec leurs positions plus osées qui enthousiasment, la femme allongée à la cruche ou celle qui est simplement assise avec ses fleurs.
Avec ces nues jamais provocantes, toujours esthétiques, Gust Graas démontre son vrai talent. Ses nues persistent comme un paysage, tranquilles et zen, qui diffusent une vraie beauté.
On peut aussi remarquer quelques fois une dualité dans les visages des femmes ; des masques et des scissions apparaissent.
Plus tard, Gust s’émancipe de ses femmes. Elles rentrent en dialogue avec d’autres femmes et embrassent même la politique.
Dans une troisième période, les habits de la femme et même son corps se délitèrent et deviennent peinture abstraite : une atmosphère dans les tons mauves ou virant au jaune, une jalousie rougeâtre ou une douceur aux couleurs méditerranéennes.
À la fin de sa vie, la peinture de Gust Graas peut paraître de nouveau plus naïve avec ses compositions féminines très ludiques. Des danseuses africaines, une influence exotique ?
Finalement on peut dire que la vue de Gust Graas sur les femmes dans ses œuvres est plutôt positive. Elle représente un hymne à la vie et à la création dans son immense multiplicité.
Pia Burggraf
Journaliste »